Ryōkan, « La rosée d'un lotus »

[1] Ô pruniers en fleurs,
soyez pour mon vieux cœur
la consolation !
Mes amis d’ancienne date
m’étant à présent ravis.

[2] Au printemps, la nuit,
sous la lune vaporeuse,
un instant qui passe.
Et quelqu’un même eut le front
de nous en fixer le prix.

[3] Vous qui avez dû
par la petite pluie froide
vous laisser mouiller,
pour venir jusqu’en ce lieu,
que vous puis-je donc offrir ?

[4] En quoi qu’il en soit,
ils ne se peuvent sécher,
les pleurs que voilà.
J’en suis même venu au point
de me soustraire aux regards.

[5] Avoir longue vie
tel fut certes mon souhait.
Qu’à ce point le monde
finirait par changer,
voilà ce que j’ignorais.

[6] Demain ?
Le jour suivant ?
Qui sait ?
Nous sommes ivres
de ce jour même.